⌜fb⌟ ⊹ (( will you, somehow, marry me ? )) — .･✧ le joker & athena.

2002.

Athena Salzman avait écourté son rendez-vous hebdomadaire au restaurant avec sa mère, Shoshana. « Tu sais qu’Abigail attend un garçon ? » La jeune femme avait soufflé et levé les yeux au ciel quand sa mère avait évoqué la femme de son frère ainé, enceinte pour la quatrième fois. « Je sais, ça fait quatre fois que tu me le dis en l’espace de trois jours, maman. » Elle plantait sa fourchette dans son plat, irritée. La mère tentait de faire passer un message à la fille, mais cette dernière ne voulait même pas en entendre parler. « Tu vas bientôt avoir vingt-sept ans, tu sais c’est… » Athena l’arrêta tout de suite, lui lançant un regard noir malgré elle. Elle sonnait même plus agressive qu’elle ne l’aurait voulu : « Maman, c’est hors de question. Je veux pas d’enfant et j’en aurai jamais. Encore moins avec Jack. C’est même pas la peine d’y penser. C’est à peine s’il s’occupe de lui déjà, alors d’un bébé ? Non merci. » Shoshana se braquait suite à l’incursion de sa fille, n’aimant pas du tout le ton avec lequel elle s’adressait à elle. Elle avait toujours eu son caractère, sa façon de dire les choses, mais depuis que sa fille était avec cet… individu, elle la trouvait changée, et pas dans le bon sens du terme. Si Athena mangeait de son côté le plus sereinement du monde, Shoshana tentait d’avaler la pilule en mangeant également un morceau. Elle murmurait d’ailleurs au détour de sa bouchée : « Je ne te parlais pas de… Jack, Athena. » Elle ajoutait après une courte pause, l’air de rien : « Tu sais… J’ai mon amie, Kate… Elle a son fils, Terrence qui travaille à la bourse de Go… » Athena balançait sa fourchette d’exaspération dans son assiette. « Mon Dieu, mais j’y crois pas. » Elle se levait même en étouffant un rire jaune et sa mère tentait de la rattraper : « Athena ! Écoute-moi ! C’est un garçon très bien. Je l’ai déjà vu et… » Athena riait encore, amère, en prenant sa veste et son sac à main avec elle : « Maman, pitié quoi. Un trader. Y a rien de pire. Gentil, en plus ? » Elle secouait la tête, ramassant son paquet de cigarettes sur la table. « Essaie pas de me marier avec je sais pas qui. Tu veux que le type meure ou quoi ? » Parce que sa mère croyait vraiment que le Joker laisserait un autre homme l’approcher et qu’il la laisserait partir en un claquement de doigts si elle le fait ? Quelle naïve ! Athena levait les yeux au ciel, agacée, devant sa mère qui fulminait : « Tu me déçois beaucoup, Athena. » La principale concernée haussait les épaules. « Je suis avec Jack. Je te l’ai dit. Et aussi… bizarre soit notre relation, t’as pas ton mot à dire. Je compte pas me séparer de lui. Puis… Vu la rapidité avec laquelle ton fils se reproduit, (Shoshana soupirait, exprimant une certaine désapprobation. Elle avait horreur que sa fille parle comme ça.) t’en fait pas. Il va compenser tous les petits enfants que je te ferais pas. Et va embêter Métis aussi, t’as qu’à lui proposer ton trader super gentil et bien sous tout rapport. C’est pas pour moi. » Athena partit sur ces mots sans en dire un de plus à sa mère. Elle s’attirait quelques regards curieux à son passage, mais ça ne l’empêchait pas de grommeler jusqu’à sa voiture, de claquer la porte et de démarrer à toute vitesse pour rejoindre sa demeure. Les inquiétudes de sa mère étaient légitimes. Dans un tout autre contexte, elle les aurait comprises et aurait même peut-être accepté de rencontrer ce Terrence, mais pas là. Pas depuis que sa vie avait opéré un changement radical. Et ce qu’elle aimait ce changement !

Lorsque la journaliste rentra chez elle, elle était au téléphone avec une amie qui lui racontait ses déboires amoureux : « Tu te rends compte ? Ce CONNARD a oublié notre anniversaire de mariage ! J’ai attendu comme une conne toute la journée. » Déjà énervée par son repas catastrophique avec sa mère, Athena n’écoutait que d’une oreille les problèmes dérisoires de son amie. Cinglante, elle aurait voulu lui répondre que c’était toujours mieux que d’avoir un mec qui se pointait chez vous de façon totalement aléatoire, quand il se souvenait de votre existence et que ça ne soit pas durant la semaine des quatre jeudi quand la lune était en Mercure ou alignée avec le restant du système solaire. Mais n’ayant pas spécifiquement envie de se disputer avec une énième personne ce soir, elle jouait la carte de l’amie faussement concernée. « Ouai, c’est clair, ça craint. » De toute manière, sa copine l’écoutait à peine, trop occupée à se plaindre et à déverser ses états d’âme en un bloc. Athena en profitait pour retirer ses talons et elle les jetait grossièrement dans un coin de son entrée. Avec nonchalance, elle alla dans son salon ouvert sur la cuisine, le téléphone toujours à l’oreille. Toutefois, elle s’arrêta net en remarquant que les lumières au-dessus du plan de travail étaient allumées et qu’un bouquet de fleurs et une boite trônaient au centre. Si n’importe qui avait paniqué devant une telle découverte, Athena comprit tout de suite qui était l’auteur de cette effraction. Comment était-il entré ? Le téléphone toujours à l’oreille, elle alla vérifier sa porte d’entrée et surtout sa serrure. Athena ne l’avait pas remarqué en entrant, mais sa clé accrochait un peu à l’intérieur. « Petit malin. » murmurait-elle tout bas pour que son interlocutrice au téléphone ne l’entende pas, un grand sourire se dessinant sur ses lèvres. Il avait dû la crocheter, avec un niveau de maitrise telle que c’était à peine remarquable. N’écoutant plus du tout son amie toujours happée par son propre monologue, Athena retournait dans sa cuisine pour examiner les cadeaux. Les fleurs étaient d’une laideur absolument indescriptible comme les trois quarts étaient fanées et surtout, elles étaient enroulées dans un bandeau qui disait To Margaret, my beloved wife. Athena fut prise d’un fou rire incontrôlable en voyant ça. Il avait dû les trouver dans un cimetière. Avec n’importe quel autre type, elle aurait été choquée, outrée, et lui aurait probablement jeté le bouquet à la figure, mais là… rien que de l’imaginer faire ses affaires et tomber sur ce bouquet dans un cimetière au détour de ses déambulations… Comment Shoshana voulait-elle que sa fille retourne avec des types normaux après quand ce genre de chose totalement incongrue et spontanée se produisait ? « Tu m’épuises, putain. » disait-elle dans le vent, mais son amie l’avait entendu. « Rien, rien, Stella, c’était pas pour toi. » Son amie reprenant son monologue, Athena s’attardait sur la boite qu’elle ouvrit à une main. Et dès qu’elle en découvrir le contenu… Elle était subjuguée. Bouche bée. Absorbée. « Attends… Attends… Stella. Je te rappelle. Je te rappelle ! » Elle lui raccrochait au nez et fermait le clapet de son portable.

Athena contemplait le contenu de la boite comme si elle venait de trouver le plus inestimable des trésors. Elle en avait même presque le souffle coupé. Elle n’osait même pas y toucher. « Mais qu’est-ce… » C’était une robe créée par Thierry Mugler et sur laquelle elle lorgnait depuis quatre ans. Quatre ans qu’elle avait été présentée en défilé et quatre ans qu’elle trônait dans la vitrine d’une de ses boutiques dans le quartier riche de Gotham. Elle pouvait rester des heures à l’admirer. Une de ses amies lui avait même demandé au bout d’un moment pourquoi elle ne l’achetait pas. « C’est pas mon salaire de merde au Gotham Gazette qui va me permettre de m’acheter une robe à quinze mille dollars. » On lui avait dit de demander à ses parents de lui offrir pour Noël ou son anniversaire. Hors de question. De demander à son conjoint alors ? Encore moins. Puis finalement… Comment avait-il su ? Il l’espionnait ? Si le coup du crochetage de porte et du bouquet l’avait amusé, le fait qu’il puisse possiblement l’épier… Ça la mettait mal à l’aise et la mettait même un peu en colère. Elle n’aimait pas bien non plus ce que tout ce cirque signifiait. Il espionnait sa poupée, il habillait sa poupée après avoir déposé la robe dans sa maison de poupée. Athena réprouvait cette objectification. Elle voulait même tout foutre à la poubelle sous le coup de l’impulsivité. Puis elle regardait à nouveau la robe, passait ses doigts sur son tissu délicat… et elle succombait à cette attention qu’elle interprétait comme du romantisme alors que c’était très loin d’être le cas. « Tu me fatigues, J’. » répétait-elle dans le vent avant d’attraper la robe qui se dépliait une fois sortie de sa boite. Elle la contemplait avec un sourire plein de satisfaction. Elle l’imaginait sur elle tout en se demandant comment il avait fait pour la voler parce qu’elle savait parfaitement qu’il ne l’avait pas acheté. Puis, quand elle l’avait enfilé, elle se dit que, finalement, elle s’en fichait pas mal, que tout ce qui comptait c’était qu’elle soit à elle. Une fois sa mise en beauté faite, Athena quittait son appartement et se rendit à l’adresse qu’elle avait trouvée, notée à l’arrache sur un bout de papier, dans la boite. Elle indiquait un building dans l’ouest du Downtown de Gotham.

Vingt-deux heures. La ville baignait dans les derniers rayons estivaux dont le soleil la gratifiait. Ils tintaient le ciel de rose et d’orange à tomber par terre. Gotham était belle, pour une fois, sous cette lueur qui donnait à l’air un je-ne-sais-quoi de doux et d’apaisé. Athena se trouvait au sommet de ce building où le Joker l’avait conviée après avoir monté les quatre-vingt-un étages grâce à l’ascenseur et gravi les quatre restant à pied pour atteindre le toit. Elle méritait bien une cigarette après s’être époumonée et après avoir maudit une bonne vingtaine de fois son amant pour l’avoir fait monter aussi haut. Un restaurant, une baie, un quai, un endroit pas en hauteur, c’était trop demandé ? Bah ! Elle aurait probablement été déçue s’il l’avait invité dans un endroit banal, pour elle ne sait trop quoi d’ailleurs. Ils avaient quelque chose à fêter ? Pas à sa connaissance en tout cas. Après avoir tiré longuement sur sa cigarette et balayer les environs du regard, elle le trouvait à quelques mètres de là, dos à elle, non loin d’un immense projecteur qu’elle n’identifiait pas tout de suite comme celui du bat-signal. Le vent s’engouffrait dans les cheveux d’Athena tandis qu’elle s’approchait de lui. Elle était assez anxieuse, mais surtout impatiente de savoir ce qu’il se tramait dans sa tête et de comprendre ce qu’ils fichaient ici. Lorsqu’elle se trouvait à ses côtés, on aurait pu s’attendre à ce qu’elle lui saute au cou et l’embrasse comme n’importe quelle femme heureuse de retrouver son compagnon. Au lieu de ça, elle restait plantée à plusieurs centimètres de lui, le toisant avec une certaine nonchalance et une pointe d’arrogance tandis qu’elle fumait sa cigarette. « J’ai pas une bonne nouvelle : Margaret pourra pas venir. On m’a fait savoir qu’elle était plus très très vivante et très fraiche. » Athena grimaçait, prenant un air faussement sérieux pour rester dans son rôle. Elle ironisait sur Margaret et le bouquet, s’affichant dans sa robe tant attendue, l’air de rien. Il n’y avait que son regard énamouré qui pourrait possiblement la trahir sur ses intentions. « Tu vas devoir te contenter de moi, je crois. Incroyable que, Margaret et moi, on fasse la même taille de robe, d’ailleurs. » Ses lèvres s’habillaient d’un rictus amusé qui ne disparaissait pas quand elle tirait une énième fois sur sa cigarette. Elle offrait désormais au Joker son profil, observant l’horizon devant elle. Son début de soirée totalement naze venait d’être définitivement oublié à l’instant où elle s’était trouvée à ses côtés.