(Intrigue 2) That look in your eyes is so familiar a gleam

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Elle était penchée sur elle, comme à son habitude. Chaque matin, le même rituel. Implorer toutes les magies au monde de lui rendre sa bien-aimée. Implorer la conscience d'Aurora de l'entendre, de répondre à son appel… L'implorer d'ouvrir les yeux et de ne plus les fermer que brièvement. Mais comme à chaque fois, Aurora était restée endormie. Sous les lèvres de Maleficent, il n'y avait eu que la respiration calme et régulière du sommeil profond. Les lèvres de la jeune femme ne répondaient jamais aux siennes. Même après plus d'un siècle.

Encore une fois, son baiser n'était pas suffisant à rompre le sort. Amère, Maleficent avait donc quitté le château pour faire le tour du domaine, arpentant le sol auprès des ronces immenses qui gardaient leur refuge, à elle et Aurora. Mais… son regard avait été attiré par un détail. Des épines brisées, des branches pliées, abimées, comme si… comme si quelque chose ou quelqu'un s'était frayé un chemin à travers ce barrage.

Furieuse, elle avait déployé sa magie en des multitudes de volutes vertes, qui se répandirent sur ses terres pour trouver l'intrus… et elle le trouva. Elle apparut devant lui dans un nuage d'ombres épaisses, qui s'écartèrent pour révéler son visage austère et la dangerosité de ses yeux verts, ainsi que l'éclat menaçant de ses cornes. Un jeune homme. Beau. Terriblement beau. Un jeune homme aux vêtements débraillés, dont le corps portait la marque de centaines de petites égratignures. Ce constat fit naître un sourire mauvais sur les lèvres de Maleficent, qui s'avança vers lui avec hargne.

« Partez, imbécile. »

Elle s'attendait à ce qu'il parte en courant. Mais il n'en fit rien, l'idiot. Elle l'observa avec une surprise mêlée de dédain tandis qu'il restait devant elle, prononçant des paroles qui ne l'intéressaient pas, mais qui toutes avaient vocation à lui prouver à quel point il était brave. N'ayant guère de patience, pas alors que ce jeune homme incarnait tout ce qu'elle redoutait concernant la Princesse qu'elle enfermait précieusement, elle n'eut qu'un mouvement de main à faire pour qu'il soit métamorphosé en arbre : un arbre laid, difforme, dépourvu de feuilles. Un arbre qui serait bientôt mort, comme la majorité de la végétation de ces terres.

Mais, alors qu'elle s'apprêtait à retrouver sa solitude et à consulter ouvrages sur ouvrages (qu'elle connaissait déjà par coeur, à force de les relire) pour trouver un remède au sort de sa chère et tendre, elle fut surprise une fois de plus, en se retournant. Là, devant elle, se tenait précisément celle qui occupait la totalité de ses pensées, en permanence… Réveillée… vivante… Mais… Non, ce ne pouvait être…

Maleficent sentit son sang se glacer alors que la pire des hypothèses lui parvenait : et si elle avait agi trop tard ? Et si cet insolent avait eu le temps de monter au sommet de la plus haute tour ? Et s'il… avait libéré Aurora, la privant par la même occasion de ce privilège ?

« Aurora ? Comment… ce n'est pas… »

Partagée entre l'effroi et la joie, elle s'avança vers elle, les ombres se dissipant pour la révéler dans toute sa noirceur, elle, la créature qu'elle était devenue en l'absence de cette jeune femme qui pouvait tout aussi bien n'être qu'un songe, tant son apparition était… inespérée.

« J'espérais tant te revoir, » souffla-t-elle une fois arrivée à sa hauteur, posant une main sur la sienne tout en plongeant son regard troublant dans le sien.

Elle avait soufflé cela à la fois comme une excuse, une explication et une interrogation. Aurora était une femme intelligente. Elle comprendrait bien vite quels sombres desseins avaient occupé Maleficent - si elle ne les connaissait pas déjà, tant la Vila avait pris l'habitude de se confier à la silhouette endormie d'Aurora.

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feat. Maleficent

La vue encore trouble, les membres endoloris, assaillie par un sentiment terrible de faim et de soif, Aurora s’était réveillée, hagarde, migraineuse, sans réellement comprendre la situation dans laquelle elle se trouvait, sans véritablement comprendre sous quelle impulsion elle s’était véritablement réveillée. Elle avait eu le réflexe d’effleurer ses lèvres, qu’elle avait découvertes terriblement sèches, du bout des doigts. C’est tout. Elle avait ouvert ses yeux sur un plafond qu’elle ne reconnaissait pas, dans une chambre qui certes ressemblait à la sienne mais… quelque chose semblait différent. Combien de temps a-t-elle dormi exactement ? Elle serait incapable de le dire. Elle a l’impression d’avoir vécu, en rêve, une vie entière. Mais une vie improbable, désordonnée, sans queue ni tête. Une vie dont une seule et même protagoniste avait été l’actrice principale. Maleficent. Aurora avait intégré sa voix à ses rêves, et ses discours et confessions n’avaient fait plus qu’un avec son imaginaire débordant. Le tout mis bout à bout devait être à la fois exceptionnel et improbable. Difficile à dire… elle se souvient de si peu de choses !

Ses jambes la soutiennent à peine au moment pour elle de quitter sa chambre pour arpenter un château qu’elle découvre totalement déserts. Elle appelle, au hasard, serviteurs et parents, ceux qu’elle s’attendrait à trouver dans ce décor diablement familier, diablement différent. Il lui faut encore arpenter plusieurs mètres, avancer dans de nombreux couloirs et escaliers, pour finalement poser les yeux sur elle. Un sentiment de réconfort la gagne tout d’abord à la pensée d’avoir retrouvé sa chère et tendre Maleficent, qui saura peut-être mettre des mots sur sa situation d’inconfort et la rassurer…. Mais son sourire, heureux, soulagé, s’estompe au moment d’observer la femme de sa vie avec plus d’attention. Elle semble comme… comme l’ombre de celle qu’elle avait connue. Il y a des ténèbres dangereuses dans ses jolis yeux verts, et Aurora, à cette vision, se fige un instant.

Oubliant son désir premier de se précipiter dans ses bras, elle n’esquisse aucun mouvement en la voyant s’approcher, pas plus qu’elle ne réagit, si ce n’est par un léger frisson à peine perceptible, quand une main se pose sur la sienne et que leurs regards se toisent. Sa voix est un souffle, il est doux et agréable à son oreille… Mais insuffisant à dissiper les craintes qui, insidieusement, viennent prendre une ampleur magistrale dans l’esprit encore légèrement ensommeillé qui est le sien, et qui peine à faire la part des choses entre rêve et réalité, entre vérité et cauchemar.

« Que s’est-il passé ? » lui demande-t-elle d’une voix qui ne dissimule pas la légère défiance que toute cette situation lui inspire. « Maleficent... réponds-moi ! »

Que doit-elle en penser ? Que déduire de cette situation houleuse ? A-t-elle raison de se sentir à ce point menacée ? Elle aimerait comprendre, mais cette situation lui échappe définitivement. Elle lui échappe dans des proportions regrettables… Elle ne veut pas avoir peur en présence de Maleficent, mais elle ne peut pas s’en empêcher, guidée par son instinct.

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that look in your eyes is so familiar a gleamDécouragée par la défiance d’Aurora, découragée par son attitude, après autant de temps d’absence, Maleficent faillit bien rebrousser chemin et partir en claquant la porte derrière elle. Mais elle n’en fit rien. Car, même l’ego meurtri, même peinée, elle n’en restait pas moins bien trop attachée à Aurora et à leur histoire, à leur amour, pour baisser les bras. Et puis, après tout… c’était bien normal qu’Aurora soit confuse. Elle venait de passer cent ans plongée dans un profond sommeil. Il était bien évidemment du devoir de Maleficent de faciliter son retour parmi les vivants.

Caressant distraitement la main qu’elle tenait dans la sienne, elle poussa un profond soupir. Il était de son devoir de l’informer, mais ce qu’elle avait à lui annoncer et à lui révéler était bien trop lourd. Et bien trop compromettant. Car la fée noire avait bien conscience du fait qu’Aurora n’apprécierait pas outre mesure la manière dont les choses avaient tournées. Elle contesterait ses décisions… peut-être même se mettrait-elle à douter de leur amour. C’était ce sujet en particulier qui retenait Maleficent de tout lui avouer dès cet instant. Elle ne supporterait pas un tel rejet. Elle ne supporterait pas que la défiance qu’elle lisait dans le regard d’Aurora s’alourdisse jusqu’à se muer en haine pure.

« Je vais tout t’expliquer… » assura-t-elle d’une voix se voulant apaisante. « Mais pas maintenant. Tu dois d’abord reprendre des forces. Laisse-moi m’occuper de toi, s’il te plaît. Aurora… »

Brisant elle-même l’espace qui les séparait encore, Maleficent la prit dans ses bras, la serrant avec force et maladresse. S’accrochant presque désespérément à elle, comme pour repousser l’instant qu’elle pressentait. L’instant qu’elle avait, au fond, redouté depuis le moment où elle avait réduit ce reinaume à feu et à sang.

« Je vais t’apporter de l’eau. Et de quoi te sustenter. Ensuite, nous parlerons… »

Évitant sciemment le sujet, elle évitait également de croiser son regard, de peur qu’Aurora ne lise dans ses yeux toutes les réponses qu’elle redoutait au point d’éprouver de la peur à son égard, elle qui était pourtant l’unique personne à n’en avoir jamais affiché en sa présence. Le cœur sombre de Maleficent se serra tristement à ce constat. Elle déglutit avec difficulté, tentant de se convaincre qu’il ne s’agissait que d’une contrariété passagère. Aurora finirait par comprendre. C’était impératif et inévitable. Pour leur bien à toutes les deux.

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feat. Maleficent

Tout t’expliquer… Maleficent n’a rien besoin de dire… En un rien de temps, Aurora ne comprend que trop bien ce que doit être l’ampleur de ce « tout » qu’elle cherche à lui expliquer… Un tout si immense qu’elle veut l’en préserver encore un moment… Peut-être bien, mais elle ne supporte pas de rester dans l’ignorance. Quoi qu’il se soit passé, elle comprend que cela a dû être conséquent, et cette perspective l’inquiète à un point terrible. Elle frissonne tandis que le « pas maintenant » formulé par Maleficent n’a que le don d’alarmer encore davantage la princesse qui peine à savoir sur quel pied danser exactement, en cet instant. Elle ne sera d’ailleurs pas capable de danser sur le moindre pied pour encore un bon moment tant elle se sent atrocement faible à l’heure actuelle.

« Tu me le promets ? » dit-elle en serrant aussi fort qu’elle le peut la main de la fée noire, trop épuisée physiquement pour que ce simple geste n’exige pas d’elle un effort qu’elle se sent à peine capable de fournir. « Je peux tout entendre, tu sais… j’ai juste besoin que tu me parles. »

Mais est-elle totalement sincère ? Est-elle véritablement capable de tout entendre ? Ce n’est pas complètement certain, en réalité. Elle a vraiment peur de ce qu’elle va découvrir… Elle s’attend au pire, et il est des erreurs qu’il est difficile de pardonner… car quand elles sont terriblement conscientes, peut-on seulement encore parler d’erreur ? Toujours est-il qu’Aurora décide, malgré tout, de se montrer le plus calme possible, aidée par un état physique qui n’invite guère à l’emportement, en vérité.

Maleficent n’a pas tort, Aurora a vraiment besoin de reprendre des forces, et pour cette raison, elle accepte qu’elle s’en aille le temps de lui apporter à boire et à manger. Elle-même aura probablement l’esprit plus clair une fois qu’elle aura bu à sa soif et mangé à sa faim… Si la chose peut être seulement possible. Elle se sent plus assoiffée et plus que jamais à l’heure actuelle.

Quand Maleficent revient finalement, en lui apportant de quoi se sustenter, Aurora accepte un temps de répit, durant lequel elle boit plusieurs longues rasades d’eau et se saisit d’un morceau de pain qu’elle dévore en presque une seule bouchée. Elle ne se souvenait plus avoir un jour ressenti la faim et la soif d’une manière à ce point violente. Ça la décontenancerait presque.

« Combien de temps suis-je restée endormie… ? » ose-t-elle demander après un temps.

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