Destruction and denial
Le soleil déclinait à l'horizon, plongeant la forêt dans une semi-obscurité lugubre. Les arbres, aux branches noueuses et tordues, semblaient se pencher les uns vers les autres, menaçants, créant un labyrinthe sinistre. Le vent soufflait maintenant avec une intensité inquiétante, produisant des gémissements étranges qui résonnaient à travers la forêt, semblable à l'écho de voix tourmentées. C'était étonnamment apaisant, pour la créature sombre qu'elle était. Depuis qu'elle et Aurore (du moins, le corps d'Aurore) étaient dans ce royaume aussi familier qu'étrange, Maleficent se sentait terriblement seule. Oh, pourtant, elle était habituée à la solitude… mais avant, elle bénéficiait au moins de la compagnie de son fidèle corbeau, qui ne l'avait hélas pas suivi dans ce monde. Pourtant, les volontaires ne manquaient pas à l'appel, dans le domaine animalier. Déjà, au-dessus de sa tête, une nuée de corbeaux tournoyaient. Elle s'avança davantage dans les profondeurs de la forêt, et les perdit de vue.
Elle s'avançait avec prudence, ses pas se noyant dans le silence oppressant. Les rayons pâles du soleil filtraient à travers le feuillage dense des arbres, créant des ombres mouvantes qui semblaient se déplacer furtivement autour d'elle. Chaque bruissement de feuilles, chaque craquement de branche accompagnait ses pas avec ce qui aurait dû être un sentiment d'angoisse absolue : mais elle se sentait à sa place, dans cette atmosphère sinistre.
Autour d'elle, il n'y avait que fleurs fanées aux pétales flétris, que teintes sombres et ternes. Désolation et mélancolie profonde se disputaient la place pour qualifier cet environnement. L'odeur âcre et piquante des végétaux fanés se mêlait à l'air ambiant… aucune âme saine d'esprit ne s'aventurerait plus loin. Mais Maleficent avait perdu, depuis des lustres, le luxe de penser qu'elle était innocente.
Alors qu'elle progressait, des murmures sinistres semblaient émaner des profondeurs de la forêt. Des voix chuchotaient des mots indistincts, imprégnés d'une menace sourde. Elle ne pouvait distinguer leur provenance, mais ils semblaient l'appeler, cherchant à l'attirer vers l'inconnu. Une brume épaisse commençait à s'élever, enveloppant les environs d'un voile mystérieux. Intriguée, elle les ignora néanmoins. Si les créatures qui peuplaient ces bois souhaitaient la voir ou lui adresser la parole, ils le feraient. De tous temps, elle avait repoussé les êtres les plus beaux, les plus rayonnants… mais les êtres de l'ombre, eux, elle les accueillait. Parce qu'ils étaient comme elle. Repoussants, détestés, craints.
La Vila découvrit bientôt un ruisseau sombre et tumultueux, qu'elle longea. Au lieu d'être transparente, l'eau était trouble, presque opaque. Les rares poissons qu'elle décelait sous la surface étaient dotés d'écailles sombres et de yeux perçants, et semblaient la fixer avec une lueur malveillante. Elle esquissa un sourire, car au lieu d'être intimidée par ce tableau, elle en fut enchantée. Au cœur de cette forêt se trouvait le château qu'elle avait fait apparaître pour garder Aurore. Plus la forêt était terrifiante, moins les visiteurs seraient nombreux.
À mesure qu'elle avançait, la végétation se transformait en un enchevêtrement de plantes rampantes et de ronces épineuses, déformées par la magie malfaisante qu'elle répandait sur son passage. Les arbres se tordaient en des formes grotesques, leurs branches griffues semblant s'étendre vers elle dans une menace silencieuse - ou une protection contre les plus curieux, ainsi qu'elle l'espérait.
Enfin, elle aperçut son château. Mais ce ne fut pas tout. Car, en dépit de ses précautions et des protections sinistres qu'elle avait mises en place pour protéger le corps endormi d'Aurore, un homme était parvenu à s'aventurer entre les ronces. Fort heureusement, elle l'aperçut avant qu'il ait eu le temps de pénétrer dans l'enceinte du château. D'un geste de la main, Maleficent fit apparaître un épais mur de ronces, aussi menaçant qu'implacable, qui recouvrit l'entrée.
« Quelle impolitesse. On ne s'aventure pas ainsi sur les terres d'une Dame », le réprimanda-t-elle d'une voix à l'onctuosité dangereuse, tout en s'avançant pour s'arrêter à quelques mètres seulement de lui. « Ce château est Mien. Partez. »
b l a c k f i s h